IMPOSONS L’ÉGALITÉ RÉELLE D’ACCÈS AUX PROFESSIONS ET AUX RESPONSABILITÉS DANS LES SECTEURS DES ARTS ET DE LA CULTURE
L'onde de choc de l'affaire Weinstein qui semblait concerner uniquement dans un premier temps les questions de harcèlement, de violences sexuelles ou sexistes, et le milieu de l'industrie du divertissement, ne cesse de se propager. Grace à leur activisme sur les réseaux sociaux, un peu partout, des femmes ont pris la parole pour dénoncer en exigeant justice et égalité. On ne peut que s'en réjouir en tant qu'organisation syndicale mobilisée sur ces questions.
Dans le domaine culturel, les répercussions sont si considérables que certains tabous sont ébranlés. Le totem de l'absolue liberté de choix artistique, le dogme de la prééminence de l'acte créateur avant tout autre considération sont remis en cause. Et s'il ne s'agissait parfois que de cache-sexes pour dissimuler une reproduction sociale qui place toujours les hommes et les femmes en situation inégalitaire ? Force est de constater que les chiffres le prouvent.
Ne prenons qu'un exemple. Depuis que les femmes ont été autorisées à postuler partout pour intégrer les ensembles symphoniques et que les principales étapes de sélection se font à l'aveugle derrière un paravent, celles-ci se sont imposées en nombre dans la plupart des ensembles. Mais pour les rôles de solistes comme pour les postes de direction artistique où l'on choisit " une personnalité ", les hommes restent ultra-majoritaires. C'est la preuve que lorsque la mise à égalité des chances est réelle, les résultats sont objectivement très différents.
Quels que soient nos nombreux désaccords de fond avec la politique du gouvernement et de la ministre de la culture, nous notons que Françoise Nyssen, vient de rendre publique une " feuille de route ". Après avoir rappelé la cruauté des statistiques, elle énonce que " l'égalité professionnelle " est un de ses objectifs et que parmi les moyens figurent " le recours aux quotas de progression, aux objectifs chiffrés ". Parallèlement, le Département des Etudes de la Prospective et des Statistiques (DEPS) du ministère vient de publier à l'occasion du 8 mars un document qui montre que les inégalités sont criantes, notamment dans le spectacle vivant, et qu'elles ne se résorbent pas avec le temps.
Parallèlement, à l'initiative d'une fondation britannique, une cinquantaine de festivals musicaux vient de prendre l'engagement de faire évoluer leur programmation vers plus d'égalité. S'il reste à constater ce qu'il adviendra réellement, c'est totalement inédit.
Préalablement à la cérémonie des César, il y a quelques jours, un collectif de professionnels du cinéma publiait une tribune intitulée " les quotas, une étape inévitable pour vaincre les inégalités " et qui se termine par un appel aux " organisations professionnelles et syndicales de la culture " à " participer au changement ".
Pour notre part, alors que les orientations de notre Fédération comme celles de la CGT placent l'objectif d'égalité au premier plan de leurs revendications, nous décidons que partout où nous représentons les artistes et les personnels techniques et administratifs des secteurs du spectacle, de l'audiovisuel, du cinéma et de l'action culturelle et où des aides financières se décident, c'est à dire notamment au Centre national du cinéma et de l’image animée (CNC), au Centre national de la chanson, des variétés et du jazz (ou CNV), au Fonds pour la Création Musicale (FCM), à l’Association pour le Soutien du Théâtre privé (ASTP) mais aussi dans les diverses commissions consultatives mises en place par des collectivités territoriales, nous proposerons désormais des objectifs chiffrés contraignants pour progresser réellement vers l'égalité professionnelle entre les hommes et les femmes. Nous revendiquons aussi l'adoption de tels objectifs par les services déconcentrés du ministère de la culture et par les Organismes de Gestion Collective (OGC) du droit d'auteur et des droits voisins.
D'autre part, nous revendiquerons et proposerons dans les négociations de branche ou d'entreprise des accords sur l'égalité femmes-hommes qui fassent disparaître les discriminations que constituent les disparités salariales, notamment par le biais des temps partiels contraints.
Mandat est donné au collectif Femmes-Mixité et à la Commission Exécutive de la fédération d'élaborer des propositions de déclinaison concrète de ces décisions de principe dans les différentes instances où nous représentons les professionnels.
Paris, le 12 mars 2018.