Mise à jour le 31 mai 2023
FESTIVAL DE CANNES : LE GOUVERNEMENT NE FERA PAS TAIRE LES ARTISTES !
Le 27 mai dernier, lors de la remise de la Palme d’or du Festival de Cannes pour son long métrage Anatomie d’une chute, Justine Triet (que nous félicitons chaleureusement au passage) a pris la parole pour dénoncer la répression de la contestation historique contre la réforme des retraites et a fait le lien avec la politique néolibérale du gouvernement qui casse l’exception culturelle française. Nous saluons Justine Triet pour ces mots courageux qui ont été très bien accueillis par le public.
À l’unisson, la ministre de la Culture, Rima Abdul Malak, suivie de son collègue Roland Lescure à l’Industrie, des député·es et militant·es Renaissance ainsi qu’une partie de la droite crient à l’indignation et à « l’ingratitude » de la réalisatrice, qui n’aurait pas dû formuler de critiques ayant elle-même « profité d’un système financé par les impôts des français » !
Non, le cinéma français n’est pas financé par les impôts mais par des taxes parafiscales, gérées par le CNC, qui font son originalité même. Quand bien même une partie de la politique publique repose sur des subventions, notamment dans le spectacle vivant, les artistes ne sont pas là juste pour montrer au monde une œuvre.Ils et elles sont comme nous toutes et tous, empreint·es de ce qui se passe dans le monde et dans le pays, et peuvent témoigner du recours sans mesure à la force pour piétiner un mouvement social légitime et nécessaire. N’est-ce pas le propre de la citoyenneté et d’une démocratie que de s’exprimer librement ? Subventions ou non, pourquoi devraient-ils et elles se taire ?
La politique publique, qu’elle soit basée sur la régulation de l’économie comme dans le cinéma, ou le financement par des établissements publics ou des subventions, n’est pas la propriété du Prince et des courtisans, qui décideraient selon leur plaisir ou leur déplaisir en cas de critiques.Les politiques de soutien à la Culture ont été mises en place progressivement à partir de la Libération, justement pour protéger de la loi du plus fort et pour assurer l’indépendance de la création. C’est de ce vivier qu’émergent des créatrices comme Justine Triet. La ministre de la Culture a une fois de plus brandit l’importance du soutien déployé au secteur culturel durant le Covid pour dire que nous n’avions pas matière à nous « plaindre » ni à revendiquer quoi que ce soit.
Faut-il rappeler que durant cette période le gouvernement avait fermé unilatéralement cinémas et lieux de spectacle considérant notre secteur « non essentiel » ? Prendre de haut la profession comme aux Molières en évoquant ces arguments inconsistants, c’est ramener les politiques publiques à une aumône, une conception descendante depuis le sommet de la pyramide du pouvoir, et à une à vision effectivement libérale qui assimile la politique publique à un boulet dont il faut réduire le poids.
A l’indignation de cette classe politique néo-libérale, nous opposons l’indignité de cette même classe. La réforme des retraites a été adoptée par la force, sans même que les député·es n’aient pu voter le texte ! Le gouvernement joue son va-tout pour clôturer cette « séquence » alors même que la très grande majorité des françaises et français n’est pas prête à tourner cette page.
Faire taire les voix qui s’élèvent, qui s’opposent, tuer les contradictions, refuser de conduire le débat à l’Assemblée nationale relève de l’indignité.
Toutes et tous, nous devons observer avec attention l’attitude de la majorité vis-à-vis de l’examen de la proposition de loi du groupe LIOT prévue le 8 juin, alors que la Première Ministre s’est déjà offusquée contre un texte qu’elle juge anticonstitutionnel.Le 6 juin, lors de la mobilisation nationale à l’appel de l’intersyndicale, montrons-leur que rien ne pourra nous museler.
Nous gagnerons !